La Conspiration - Tome 1 by Maggie HALL

La Conspiration - Tome 1 by Maggie HALL

Auteur:Maggie HALL [HALL, Maggie]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2015-06-03T22:00:00+00:00


23.

Nous sommes assis sur une fontaine en pierre, non loin de l’allée bordée de tulipes qui mène à la basilique Sainte-Sophie. Elle est encore plus belle que sur la carte postale. Le gigantesque édifice couleur cuivre resplendit dans la nuit, entouré de ses quatre minarets droits et élancés comme des sentinelles.

Derrière nous, sa jumelle, la Mosquée bleue, flamboie aussi, comme un reflet dans un miroir. Les deux bâtiments, avec leurs pelouses parfaitement entretenues et leurs palmiers illuminés, ressemblent à un décor de Disneyland.

Ah, comme je préférerais être innocemment à Disneyland qu’ici !

Je touche doucement mon bandage à la cuisse. En sortant du marché, nous avons acheté des pansements, des antidouleurs et des tongs. Jack m’a montré comment bien fermer une coupure, mentionnant au passage que je serai une pro des premiers secours d’ici la fin de notre voyage. Il a pansé ma jambe avec délicatesse, beaucoup moins brusquement que ma plaie à l’épaule.

Il regarde sa montre.

— Trois heures trente-deux, dit-il.

Deux gardes passent devant l’entrée principale de la basilique, puis continuent leur ronde.

Il est assis à un mètre de moi, comme s’il voulait garder ses distances après notre quasi-baiser du marché. J’ai l’impression qu’il y pense encore, lui aussi. Je ne peux m’empêcher de jeter des coups d’œil furtifs à sa bouche charnue, douce, presque pulpeuse – tout à coup très consciente de la mienne. Il se mordille la lèvre inférieure. Je serre les lèvres et me force à détourner le regard.

Le froid de la pierre pénètre mes jambes à travers ma robe légère. Je frissonne. Je me réchauffe les mains sur le kebab fumant enveloppé dans du papier d’aluminium que nous avons acheté tout à l’heure auprès d’un marchand ambulant. J’ai l’estomac noué – sans doute la peur, l’excitation –, mais ça fait des siècles que je n’ai rien mangé. Depuis que je suis partie de chez moi, peut-être ? En plus, l’odeur délicieuse du sandwich que Jack est déjà en train d’engloutir fait gargouiller mon estomac.

Alors que j’entreprends d’ouvrir l’aluminium, mon téléphone se met à vibrer. Je le sors de mon sac le plus vite possible. Pourvu que ce soit ma mère ! Je pensais qu’elle serait dans l’avion jusqu’à demain matin, mais on ne sait jamais.

Déception. C’est Stellan. Dix-huitième appel en absence de sa part.

Je range le téléphone dans mon sac.

— Pourquoi Stellan est-il aussi inquiet, si les Dauphin ne savent pas qui je suis ?

Jack se crispe, comme à chaque fois qu’il entend le nom de Stellan. Ces deux-là ont l’air d’avoir une relation compliquée.

— Sa mission est de s’occuper de toi, même si tu n’es qu’une invitée parmi d’autres, répond-il sèchement en mordant dans son kebab.

Dans la lumière des lampadaires, sa chemise blanche déchirée et maculée d’épices a l’air orange.

— S’il se montre à la hauteur, il est susceptible d’obtenir un poste en Russie. Il n’a pas le droit à l’erreur.

— En Russie ? Près de sa famille ?

Un marchand de glaces passe dans la rue, poussant devant lui son chariot. La musique métallique qu’il diffuse est assourdissante.



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